Squelettes dans la ville

Signal de crise (2012-2013) d'abord puis de reprise (2014 et surtout 2015), les carcasses d'immeubles bizarrement étayées se couvrent d'échafaudages en métal ou en bois. Des herbes folles, quelques squatters et des gamins à la recherche de leur ballon colorent et animent un peu ces structures nues.

Des acrobates sans casque ni harnais travaillent debout ou assis les jambes dans le vide par 35 degrés et plus.

Les parpaings gris, bien rangés et arrosés pour éviter la casse, attendent leur heure.

Il a dû y avoir à un moment donné des architectes et des contremaitres.

La capacité des entreprises à faire le gros dos, notamment dans le bâtiment (main d'oeuvre hyper flexible embauchée à la journée, location d'équipements...) dans l'attente du retour des donneurs d'ordre ou de l'Etat, n'est plus à démontrer (cf. chronique sur l'entrepreneur africain).

Moins de normes, moins de procédures et un calendrier élastique en fonction des crédits bancaires.

Pas de grues démentielles, ni de rythme vertigineux de construction à la chinoise, 24/7 sous les bâches tricolores et les projecteurs mais à l'arrivée un résultat pas très différent : l'essentiel y sera, avec quelques malfaçons et des finitions qui permettront de retenir un pourcentage du contrat.

Quoiqu'il en soit, la plupart des immeubles tant bien que mal se terminent. De hauteur modeste, sur trois ou quatre étages, un peu en retard sur les normes environnementales, une fois équipés de clim et de wifi, ils constitueront néanmoins un habitat ou des bureaux appréciables dans un marché de pénurie où un toit en dur au dessus de la tête reste l'exception. Mais ces réalisations vieillissent vite par ces contrées et leur durée de vie dépasse rarement quinze ou vingt ans. Une sorte d'obsolescence programmée !