Quand les fonctions support se rendent insupportables

Non contente de laminer les individus qui essaient tant bien que mal de recréer des îlots de convivialité à la base, l'organisation de la grande entreprise, profitant d'un middle management désemparé et d'un top management finalement assez lâche, va lentement mais sûrement, paralyser la génération de revenus.

Aujourd'hui, le malheureux vendeur de copieurs ou le front officer de banque ou d'assurances doivent tirer comme le manoeuvre sur un chemin de hâlage, une bonne dizaine de fonctions support (mal nommées) : Conformité, Risques, Qualité, Juridique, Contrôle Interne, Communication, Organisation, Stratégie...

De réunions en compte-rendus, de séminaires en formations, d'injonctions en contre-ordres, de procédures en réglements, l'homme de revenus finit par oublier ses clients qui ne trouvent plus en lui qu'un représentant noyé, amer, frustré, scotché à son bureau, n'en pouvant mais.. passant son temps à se faire l'interprête de sa maison devenue folle. "C'est pas moi, mon pôv 'monsieur, ce sont mes collègues ...".

Sous couvert de meilleure gouvernance, de contrôle, d'efficacité, de spécialisation, d'homogénisation des bonnes pratiques, les fonctions support ou centrales ont progressivement pris le pouvoir surfant sur l'impéritie du management. Tout le monde aux abris ! Plus aucune responsabilité individuelle.

L'important est de respecter le manuel et tant pis, si on meurt, faute de clients, eux-mêmes souvent en proie aux mêmes maux. On a vu des fournisseurs ne pas pouvoir se faire payer car leur propre informatique bloquait l'émission de factures en fonction de critères de clientèle (ou de leur absence).

Le régne du matriciel, inauguré à la fin des années 80 et qui compliquait déjà bien les choses (métiers vs. géographie) est devenu ingérable avec l'omnipotence des fonctions centrales. Tout le monde veut sa ligne mondiale, traversant les organisations, jusqu'à la logistique et au courrier ! Les infortunés chefs de divisions ou patrons de filiales etc.. auparavant des seigneurs, ont été réduits au rôle d'hôteliers bénévolents, observant tout ce monde, en missions coûteuses refacturées (et souvent bidon) se déchirant sous leurs yeux.

Attention, si les Etats-Unis ont donné le signal de cette désastreuse évolution (accéléré post 9-11), l'Europe rattrape vite ! Tandis que les opérateurs émergents, moins gangrenés ou plus lucides, avancent à marche forcée de leur côté, profitant de l'ankylose de leurs compétiteurs des pays riches, pour gagner des marchés en étant plus réactifs, en n'imposant pas leurs procédures à leurs clients, en étant moins exigeants et donneurs de leçons... Demandez aux chinois ce qu'ils pensent de la Conformité..!